Aphasie primaire progressive : Le Prince à la Tête de Coton, une pièce de théâtre aimante

Aphasie primaire progressive : « on perd ses mots comme on perd ses clefs » 

Jacques Berger, professeur tout juste retraité, commence par mélanger quelques syllabes à l’oral. Sa famille s’en amuse, sauf son fils Alexandre qui s’agace. Il ne comprend pas que son inquiétude ne soit pas partagée. Ou alors, il souffre simplement de voir son père déchoir, lui l’enseignant, fan de Jacques Tati.

Jacques décide de consulter. Le diagnostic tombe : il est atteint d’aphasie primaire progressive. Cette maladie au terme barbare pose alors de nombreuses questions familiales. Alexandre s’interroge sur ce qu’est un homme sans langage. Amandine, elle, pragmatique, se projette en femme qui devra en permanence avoir son mari à l’œil. Charlotte, la fille, vient souvent à la rescousse de son père : elle excuse ses nombreux lapsus et ses bizarreries culinaires.

Malgré les séances d’orthophonie, le langage devient plus confus. Les mots s’enfuient, se cognent, se perdent dans un non-sens que chacun perçoit. Ses absences toujours plus longues plongent rapidement Jacques dans un mutisme permanent. Et son silence peine à masquer sa souffrance. La famille Berger l’accompagne au quotidien, s’organise autour de ce père absent. Elle conforte ainsi leur patronyme à l’étoile des mages.

Aidant et aimant : une lettre de différence

Le prince à la tête de coton met en scène une famille dont les membres aiment leur père avant tout. Nicolas Porcher propose une pièce tirée de son livre, où le spectateur partage les craintes de cette famille d’aidants. Que devient-on sans les mots, comment trouver la force nécessaire pour accompagner au quotidien ceux qui ne parlent plus ?

Il enrobe ce sujet difficile d’un havre poétique et musical : instruments en live, dont une admirable cithare vietnamienne, spectacle de marionnettes… On y retrouve un prince, allergique à la gravité, qui se réfugie progressivement dans des nuages de coton. D’abord relié par une corde au monde des vivants, que faire, lorsqu’à force de tenir, on se brûle les doigts ? Un moment de théâtre touchant qui traite avec délicatesse un sujet dont la réalité doit se partager.